Comment les internautes peuvent-ils éviter de se faire piéger ?
S’ils ont un doute sur l’authenticité de certains avis, ils peuvent les faire tester par un site internet spécialisé, gratuit, mais malheureusement seulement en langue anglaise pour l’instant. Il s’agit de
www.reviewskeptic.com. Ses créateurs affirment être capables d’identifier à 90% les avis bidon grâce à des indices repérés dans le texte. Mais les fraudeurs exercent une veille permanente pour s’adapter à chaque fois que leurs interventions sont démasquées. C’est pourquoi j’incite les internautes à analyser prioritairement le contexte dans lequel se trouvent les avis qu’ils lisent. La cohérence est importante. De très bons avis, placés au sein de nombreuses opinions négatives, sont par principe douteux. J’incite aussi à privilégier les avis postés par des internautes clairement identifiés, avec des photos, des adresses, des noms, des mails, des pages Facebook vivantes, en se méfiant systématiquement des auteurs qui se cachent derrière un descriptif générique, par exemple « utilisateur ». Les sites de réservation ou d’achat en ligne sont, de manière générale, plus crédibles que les autres lorsqu’ils sélectionnent uniquement les opinions des véritables consommateurs, ayant payé pour le service ou le bien, au sujet duquel ils s’expriment.
Des mesures commencent à être prises. En septembre 2013, aux Etats-Unis, 19 entreprises ont été pour la première fois condamnées à payer des amendes pour avoir créé et publié de faux avis en ligne. En Australie, des amendes extrêmement élevées sont prévues, allant jusqu’à un milliard de dollars. L’information des internautes joue aussi un grand rôle. L’association allemande Stiftung Warentest, qui est comparable au magazine « 60 millions de consommateurs », a par exemple montré que la très grande majorité des sites allemands d’avis sur les hôtels n’étaient pas capables d’éliminer les avis bidon. Un seul d’entre eux avait un filtre réellement efficace.

Cette étude a fait l’objet d’une forte médiatisation, et augmenté la méfiance des internautes allemands envers l’ensemble des sites similaires. Les campagnes menées à la télévision française pour mettre en garde les consommateurs ont également engendré un scepticisme que j’ai pu mesurer. De la même manière, les internautes qui lisent des articles de presse sur les faux avis deviennent plus prudents. Pour les sites d’avis en ligne, cette chute de la confiance est très problématique. C’est pourquoi certains sites cherchent désormais à se faire certifier. L’AFNOR a publié en juillet 2013 une norme, certifiant une politique active de lutte contre les faux avis. Les exigences concernent en particulier l’identification des auteurs des avis, notamment par une adresse mail valable. Des améliorations sont encore nécessaires, il faudrait obliger les auteurs à fournir la preuve qu’ils ont vraiment consommé le service ou le bien dont ils parlent. Mais c’est un progrès notable. Et la France est pionnière au plan international dans ce domaine.